FRANCE đŸ‡«đŸ‡· (Marseille) : autopsie d’un Ă©chec collectif

Lu dans Le Figaro

Isabelle Fort fait un constat amer. «Nous sommes en train de perdre la guerre contre les trafiquants à Marseille», estime la responsable du pÎle criminalité organisée du parquet de Marseille.

Une consommation banalisée

Au cours de leurs auditions, les sĂ©nateurs ont identifiĂ© une derniĂšre problĂ©matique. «Il y a un sujet Ă©vident qui tient Ă  la consommation, affirme le prĂ©sident de la commission d’enquĂȘte parlementaire JĂ©rĂŽme Durain. Beaucoup des consommateurs n’ont pas le sentiment d’ĂȘtre dans un acte de transgression».

Selon des statistiques de la préfecture de police des Bouches-du-RhÎne, 53.000 amendes forfaitaires délictuelles ont été dressées depuis leur création dans le département, soit 13 % du volume national.

Une situation qui interroge le prĂ©sident de la commission d’enquĂȘte. «On nous a dit que les consommateurs avaient du sang sur les mains, rappelle le sĂ©nateur socialiste. Il faudra Ă  un moment donnĂ© qu’on choisisse. Soit on considĂšre que la consommation de drogue, finalement, c’est illĂ©gal, et on respecte cet interdit. Soit on s’accommode d’une forme de tolĂ©rance morale.» Une rĂ©flexion qui sera nul doute au cƓur du rapport que les sĂ©nateurs rendront en mai prochain.

«Le constat que l’on partage tous, c’est que les politiques publiques ont Ă©tĂ© un Ă©chec depuis des annĂ©es sur notre territoire», regrette Hassen Hammou. Le cofondateur du collectif Trop jeune pour mourir, auditionnĂ© par les sĂ©nateurs, appelle notamment Ă  «rĂ©Ă©quiper les centres sociaux qui sont aujourd’hui en perte de moyens et sont quand mĂȘme, avec l’Ă©cole, les derniers acteurs prĂ©sents sur nos territoires» ou encore «repenser les questions d’habitat indigne, remettre de la vie et du service public lĂ  oĂč il n’y en avait plus». «Cela ne paraĂźt rien mais c’est tout, c’est ce qui est propice Ă  l’organisation et Ă  l’installation du trafic dans nos citĂ©s», estime celui qui est par ailleurs porte-parole d’EELV en Provence-Alpes-CĂŽte d’Azur.

«Nos quartiers aujourd’hui sont en ruines, rappelle Katia Yacoubi, membre Ă©galement du collectif Trop jeune pour mourir. Ces jeunes, on les voit comme des voyous, comme des assassins, certains d’entre eux le sont devenus mais ils ne sont pas nĂ©s comme ça». «Il n’existe pas d’argent facile, martĂšle Hassen Hammou. Cet argent-lĂ  n’est pas facile. La plupart des petites mains du trafic ne sont plus attirĂ©es par l’appĂąt du gain. Ils sont payĂ©s 50 euros pour guetter. Ce trafic est plus pour certains une question de survie, quand on sait que 70 % des jeunes n’ont pas le bac dans les quartiers nord et que dans un quartier comme La Castellane, 60 % des habitants sont au chĂŽmage.»

Devant les sĂ©nateurs, pour la premiĂšre fois depuis sa nomination, Nicolas Bessone Ă©voque publiquement et avec fatalitĂ© ce phĂ©nomĂšne. «On commence Ă  avoir de plus en plus de problĂšmes de corruption de fonctionnaires de police», dĂ©plore le procureur de la RĂ©publique de Marseille. «Sur cette corruption de basse intensitĂ©, il faut ĂȘtre clair : la bataille est perdue», insiste Nicolas Bessone.

QuestionnĂ© et interviewĂ© dans « Apolline Matin » ce mercredi

« Chaque homme a un prix »

Nicolas Bessone appelle donc Ă  augmenter les moyens de la justice, et de la police, pour poursuivre la lutte contre le trafic de drogue Ă  Marseille. « Les moyens ont Ă©tĂ© renforcĂ©s, souligne-t-il. Ce n’est pas suffisant, il faut renforcer Ă©videmment les services de police, le tribunal judiciaire de Marseille. Mais il faut Ă©galement des Ă©volutions lĂ©gislatives pour nous donner un corpus juridique qui nous permette de lutter contre ce phĂ©nomĂšne trĂšs, trĂšs important. »

Et à ce titre, il demande des tribunaux spéciaux pour juger les trafiquants de drogue, qui peuvent faire pression sur les jurés.

« La difficultĂ©, c’est que ces faits qui sont liĂ©s Ă  de la menace, de la terreur, sont jugĂ©s par des cours d’assises ordinaires, pointe le procureur de la RĂ©publique de Marseille. Des jurĂ©s populaires rendent la justice dans un contexte de menace, de terreur, et cela ne nous semble plus adaptĂ©. Qui penserait faire juger encore aujourd’hui par des jurĂ©s populaires des actes de terrorisme? Ce sont des magistrats spĂ©cialisĂ©s, investis, payĂ©s pour ça. Nous appelons Ă  une Ă©volution lĂ©gislative pour prendre en compte ce phĂ©nomĂšne particulier. »

En face, les narcotrafiquants n’hĂ©sitent pas Ă  tenter de corrompre. « Les moyens financiers de ces organisations sont illimitĂ©s, dĂ©plore Nicolas Bessone. Malheureusement, chaque homme a un prix. Nous avons des enquĂȘtes en cours. Des fonctionnaires de police et de l’administration pĂ©nitentiaires sont approchĂ©s, menacĂ©s, voire achetĂ©s. »

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Et tout ce beau monde inquiet, l’ai-je entendu dans ces affaires qui dĂ©montrent l’incohĂ©rence de la justice et des administrations rĂ©galiennes ?

Non, tous planquĂ©s Ă  l’abri du Dalloz !

Affaire Fievet

Affaire Gibaud

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